• Le patois mayennais

    Le mayennais, ou encore patois mayennais, est la variante du Gallo, une langue d'oïl, parlée dans le département de la Mayenne.

    Histoire

    Il n'est pas une déformation du français, contrairement à une erreur fort répandue. Il provient du latin populaire, introduit en Gaule par la conquête romaine, et qui supplanta peu à peu la langue gauloise d'origine celtique. La prononciation populaire déforma ce latin. Le français et le gallo, donc le patois mayennais sont issus du même latin populaire du Bas-Empire romain. Ils ont évolué différemment, le mayennais restant généralement plus archaïque, gardant des formes plus anciennes que le français. La diffusion du français a bénéficié de l'unité territoriale et cette langue parlée est tombée à l'état de patois pratiqué par les populations rurales jusqu'au XXe siècle.

    Répartition géographique

    Le mayennais est traditionnellement parlé dans le département de la Mayenne. Les parlers de la Mayenne apparaissent plus prochement apparentés au parlers de la Haute-Bretagne (gallo) que les parlers normand. Le Mayennais se distingue cependant du gallo, contrairement au gallo de Haute Bretagne, il n'est pas influencé par le breton. On distingue également quelques différences avec le parler manceau (Sarthe), du Perche et celui d'Alençon. Dans le sud de la Mayenne, dite la Mayenne angevine, l'influence du parler angevin est important.

    Français régional de la Mayenne

    Quelques exemples :

    • l'échaye' - l'échalier
    • claver la porte - fermer la porte
    • mett'le crouillet - mettre le verrou
    • les œufs'couis - abandonnés, pourris
    • le marcaô rouaude - le chat fait entendre des cris rauques lorsque les chattes sont en chaleur
    • evaille' - étendre
    • le nouzille' - le noisetier
    • les mettre en beulots - les mettre en tas
    • s'engouille' - avaler de travers
    • le piston - la braguette
    • eun diab' - boisson motié café, moitié eau-de-vie
    • l'ergent illi brûle les dais - il dépense sans compter
    • rouzine' - lambiner
    • habille' ses vezins - dire du mal de ses voisins
    • heula ! - hélas
    • A la r'voyure - aurevoir
    • Auto butante - Auto tamponneuse
    • Beroutte - Brouette

    Exemples

    • « Que la paix du Seigneur soit toujours avec nous aut'», et avec ton esprit que j'illi dit en y'allongeant deux va t'laver su' l'coin d'la goule ! Reuné tait beurzillé saoul et, je m'trouvis aperçu qu'i s'prenait pour le pape.
    • « Les gâs sont bien au chaud. Les autres mariolles vont faire les rabateux sous la piée et le vent. Le temps s'embernodi cette raissiée les femmes vont faire la buée »
    • « Rapi-té ben cont'eur le meur, de pou qu'la roue d'la charte é n'fasse coti du pétoué cont'eur tes hardes. » (= aplatis-toi bien contre le mur, de peur que la roue de la charrette ne fasse jaillir de la boue contre tes vêtements).
    • La mort du cochon : « L’matin conv’nu, i sont là tertous. L’saigneu’ a apporte’ ses scies, ses coutiaux, tout son fourbi. On cass’ eun’ croût’ et on bê un permie’ p’tit jus bin arrouse’, les bon’hommes i s’dirigeant vers la subite où l’gorin roupille comme un sonneu’! S’ment pas trop réveille’, l’quiéquié grognassant é tire’, pousse’, culbute’ su’ eun’ bonn’ fourchée d’paille fraîche. Ah ! c’é pas long ! L’bouche’ d’occasion a enfonce’ son coutiau. L’pourciau oince tant qu’i peut, il a beau sacte’des pattes, les gars i t’nant bon. La ménagère r’ce’ l’sang qui pisse dans la cuvette ; lè, é pens’au boudin. A c’t’heure, l’gorin, i crie pus. I bouge côr’eun p’tit què d’eu’ patte. Ca c’é bin expédie’et proprement. Pendant qu’i finit d’passe’, on va à la minson prend’eun’ p’tit douce avec eun’ bonn’ pichtée d’rude ; ça r’mont’ le moral. »

    Sociolinguistique

    Il n'a pas un caractère ethnique très accentué (contrairement à la Bretagne, comportant langue bretonne et gallo)[réf. nécessaire]. Il conserve les caractères inhérents à la Mayenne, pays de marche et de frontière. Ceci explique à la fois les ressemblances et les différences que l'on peut constater dans les parlers des diverses parties de la Mayenne, et de l'influence des parlers voisins : le manceau à l'est, le normand au nord, l'angevin au sud et le gallo à l'ouest. Son écriture et sa grammaire ne sont pas codifiés. C'est une langue essentiellement rurale, populaire et vivante.

    Statut, reconnaissance

    C'est l'une des plus certaines originalités de la Mayenne que sa langue, un « français local » (selon André Martinet) qui reste encore compris mais pratiquement plus parlé. Un certain nombre d'études cherche l'origine de ces mots pour rendre sa dignité à ce « patois ».

    Vocabulaire

    • Un certain nombre de mots se retrouvent dans l'ancien français. Il en est de même pour l'origine latine (claver de clavis, furtier (voleur) de fur, cotir (jaillir) de cotere. On retrouve aussi quelques termes de dialecte de la langue d'oïl et le parler mayennais offre des similitudes avec le parler québécois ou acadien, resté en dehors des évolutions du français de France, et issu du français du XVIe siècle.

    Grammaire et prononciation

    Ses caractères principaux (par rapport à d'autres parlers provinciaux) sont :

    • le son oi prononcé eu répond à la fois à é, è, oi, i et ui.
    • Eu se prononce u. Eugène devient Ugène.
    • -ien se prononce in : chin (chien), bin (bien)
    • La diphtongue au, ao est utilisée à la place de al : un j'vau (un cheval)
    • Cl, gl, bl, pl, fl deviennent ki, gi, bi, pi, fi : pianche (planche)
    • Je et on sont employés à la place de nous. (j'mangeons)
    • La 3e personne du pluriel de l'indicatif présent se termine en ant et en int à l'imparfait (i'mangeant, i'mangint)
    • Au passé simple, les terminaisons en is, it sont courante. (i'mangit, je mangis)
    • Le subjonctif est terminé par je : j'sais'je (il faut que)
    • Les x au pluriels sont prononcés, les cosiaux/cosiawx, les sauts

    Expressions

    • I'bis'rait eun'bique enter'les cornes (il a le visage maigre)
    • E'déculottrait eune pape sur la piace de l'église (elle ne respecte rien ni personne)
    • El'é comme la Vierge des Rogations, é n'a ni panse ni tétons ! El'é comme les biques, elle a la grèsee en d'dans ! (c'est une fausse maigre)
    • I'n'y a d'si vilain pot qui n'trouve son couverque'! (chacun peut trouver un ami)
    • S'enfier pour eun rin ! (se mettre en colère pour rien)
    • I s'écoute pour cause'. I's'parluiseI's'dit'vous ! (il s'écoute parler)
    • Van diou, la Mârrie, accot'a don à la hâ ! (Bon sang, la Marie, appuie-toi donc contre la haie)
    • c'é du suc' à pren're, d's'épines à ren're (plaisir de la conception, douleur de l'accouchement)
    • Et'franc comme eun âne qui r'cule (être un faux jeton)
    • Aller l'yab' à la d'vallée (aller très vite)
    • Faut point en déroule'pus long qu'on a d'ficelle (il ne faut pas présumer de ses forces)
    • avèr des bruch'ments de boyaux (avoir mal au ventre)

    Bibliographie

    • Etude sur les dialectes et les patois, spécialement le patois du Maine de Henri Chardon. 1868.
    • Le patois manceau tel qu'il se parle entre Le Mans et Laval. Armand Dägnet. 1891.
    • Glossaire des parlers du Bas-Maine (département de la Mayenne) de Georges Dottin. Welter, 1899.
    • Parlers et traditions du Bas-Maine et du Haut-Anjou. Le Patois Mayennais. Cercle Jules Ferry. 1981, 8è édition en 2004. Nombreux dessins en noir de Pierre Bouvet. Vocabulaire classé selon plusieurs sections thématiques : La Ferme (bâtiments, ameublement, animaux, etc.). Les Travaux (labours, semailles, lessive, mort du cochon, etc.). Qualités et défauts (sobriété, économie, bavardage, orgueil, etc). La Vie au village (église, mairie, école, artisans). Les Traditions (fêtes religieuses, foires, jeux et chansons). Récits en patois. Avec une étude sur la formation du département de la Mayenne, des remarques grammaticales et des notions de prononciation.
    • Atlas linguistique et ethnographique de la Bretagne romane, de l'Anjou et du Maine. Tome 1 (1975), tome 2 (1983). Par Gabriel Guillaume et Jean-Pierre Chauveau. Editions du CNRS.
    • Qu’est-ce que parler ? Langue et société en Sarthe et en Mayenne , Paris : SELAF, 1984. de Frank Alvarez-Pereyre.
    • Lexique du patois vivant. Le Patois Mayennais. Cercle Jules Ferry. 1987.
    • Grammaire patoise de la région de Vitré (Ille-et-Vilaine) et du Craonnais (Mayenne) de Louis Julliot

    Quelques textes en dialecte mayennais :

    • Annales et chroniques du paîs de Laval et parties circonvoisines, depuis 1440 à 1537 par Guillaume Le Doyen
    • Dialogue de trois vignerons du pays du Maine sur les misères de ce temps par Jean Sousnor
    • La veillée du pommé. Letellier.
    • Histoires et légendes des Coëvrons, 1883. Armand Dägnet.
    • Nos vieilles chansons du Bas-Maine. Lescane, 1979.
    • Contes et nouvelles en patois Mayennais. Cercle Jules Ferry

  • Commentaires

    1
    Pétris Marcellus
    Dimanche 12 Novembre 2017 à 10:32
    Je suis mayennais d'origine et né dans la Mayenne en 1939.
    Bien que ne l'ayant jamais parlé , je comprenais la patois mayennais .Dans ce patois il y avait certainement des mots celtiques .Mais on n'en parle jamais dans toutes les études linguistiques que je lis sur ces patois . Un exemple que J'ai souvent entendu : les bonnes de la vache , faire "Bronner " le veau ,etc . Or en breton "Bron " , pluriel " bronou " signifie mamelle ou sein .
    2
    Filet
    Dimanche 21 Novembre 2021 à 17:07
    Le créole antillais en tout cas est en partie un mélange du gallo ,mayennais et le normand et aussi du parler du sénégalais,et récemment du congolais
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